Catégories
français

Marvin Minsky : celui qui a façonné le futur de l’informatique et de l’IA


Dans les coulisses fascinantes de l’informatique, une autre figure éminente émerge, illuminant le chemin vers l’intelligence artificielle : Marvin Minsky. Esprit brillant et visionnaire, retour sur la vie du génie dont l’héritage résonne dans chaque ligne de code de notre quotidien. 

L’enfance d’un esprit curieux 

Plongeons dans les racines de cet homme extraordinaire. Né le 9 août 1927 à New York City, Marvin Lee Minsky a grandi dans une époque où les ordinateurs n’étaient encore que des rêves. Dès son plus jeune âge, il montre un intérêt particulier pour les sciences, la psychologie, et le piano. Il est encore enfant quand il lit les œuvres de Freud et est un pianiste précoce. 

Il sert la marine américaine (US Navy), de 1944 jusqu’à la fin de la guerre. Curieux et passionné, il trace son chemin vers l’université Harvard, où il étudie la physique, la neurophysiologie et la psychologie. Il obtient son diplôme de premier cycle en 1950. Il poursuit ses études à l’université de Princeton où il effectue un doctorat en mathématiques durant lequel il explore les fondations de réseaux neuronaux.

Son objectif est clair : comprendre le cerveau humain pour créer des machines pensantes. 

Étudiant diplômé, il construit la première machine d’apprentissage de réseau neuronal câblée au hasard, machine appelée SNARC. Il publie ses recherches dans une de 1952, « A Neuronal-Analog Calculator Based on Probability Model of Reinforcement ». 

Réseaux neuronaux, vision par ordinateurs, intelligence artificielle : les contributions pionnières

Minsky a consacré une partie significative de sa carrière à la construction de modèles informatiques inspirés du cerveau humain. Ses travaux pionniers sur les réseaux neuronaux artificiels ont ouvert la voie à des avancées majeures en matière d’apprentissage machine. Sa fascination pour la vision par ordinateur l’a également conduit à repousser les frontières sur la manière dont les machines perçoivent le monde.

En 1954, il retourne à Harvard en tant que membre junior de la prestigieuse « Society of Fellow » et bénéficie d’un soutien pour qu’il poursuive n’importe quel sujet de recherche de son choix. C’est au cours des quatre années suivantes qu’il poursuit son travail, modélisant mathématiquement les processus de la pensée humaine, jetant les bases de ce qu’on appelle aujourd’hui l’intelligence artificielle. 

Les progrès liés à la technologie des microprocesseurs et l’apparition révolutionnaire des ordinateurs personnels qui en résulte, ont relancé l’intérêt pour les idées de Minsky. Les concepts dont il est à l’origine font aujourd’hui partie de notre vie quotidienne, et nous les utilisons chaque fois que nous nous servons d’un ordinateur, d’un smartphone, que nous effectuons une recherche sur Internet ou que nous utilisons le GPS.

Pendant ce temps, Minsky révise son examen des réseaux neuronaux et travaille sur les possibilités de traitement parallèle, la manipulation simultanée d’informations par différents agents, suivant le modèle d’un cerveau humain.

Compte tenu de l’importance de son travail dans le domaine de l’intelligence artificielle, le génie trouve malgré tout du temps pour d’autres projets de recherche et inventions. En 1956, son collègue et lui déposent une demande de brevet pour le microscope à balayage confocal, un outil à haute résolution largement utilisé dans les sciences biologiques.

Minsky, McCarthy et le MIT : la naissance de l’intelligence artificielle

Son rêve ambitieux ? Une intelligence artificielle générale, capable de résoudre une multitude de problèmes. Minsky croyait en une approche holistique, où les machines pourraient égaler la polyvalence et la créativité humaines. On retiendra évidemment sa participation, tant dans l’organisation que dans les travaux de recherche, à la conférence Dartmouth en 1956. Organisée par John McCarthy, Claude Shannon et Nathaniel Rochester, cette conférence est considérée comme l’événement fondateur de l’intelligence artificielle.

Le tournant décisif de la carrière de Minsky a lieu au MIT, Massachusetts Institute of Technology. En 1958, il rejoint le MIT afin de poursuivre son travail sur l’utilisation des ordinateurs pour modéliser et comprendre les mécanismes de la pensée humaine.

Connu pour son charisme et la qualité de ses cours, il devient professeur au MIT à Boston et le restera pour le reste de sa vie. En 1959, il co-fonde avec John McCarthy, inventeur du terme « intelligence artificielle », le MIT Artificial Intelligence Project, qui deviendra plus tard le MIT Computer Science and Artificial Intelligence Laboratory. Ce lieu deviendra la pépinière d’idées novatrices. Entre autres, le laboratoire a permis de populariser l’idée du partage numérique de l’information, donnant naissance à l’open-source, et a effectué des travaux sur l’ARPANET, qui évoluera vers l’Internet d’aujourd’hui. 

Vers une Intelligence Artificielle générale 

Tout au long de ses travaux, Marvin Minsky cherche à montrer que l’intelligence artificielle est un phénomène trop complexe pour être capturé par un seul modèle ou mécanisme. D’après lui, au lieu de chercher un principe unificateur, il est préférable de la décrire comme la somme de composants divers. Il présente ses idées dans un livre en 1985, The society of mind.  Minsky propose un modèle de l’intelligence humaine, étape par étape, à partir des interactions d’éléments simples, appelés agents, en soi dépourvus d’intelligence, mais dont les interactions font naître un esprit complexes décrivant ces interactions comme constituant une « société de l’esprit ».

Vers les années 80, Minsky s’intéresse à un problème qui a rendu perplexe de nombreux psychologues, neurologues et philosophes : qu’est-ce que la conscience ? Comment est-il possible qu’un organisme comme l’être humain, de base une masse de cellules, puisse être conscient de lui-même et de son environnement, d’observer, de penser, de réagir et de conceptualiser ? Minsky établit que le phénomène qu’on appelle la conscience est en fait l’effet cumulatif de plusieurs processus neuronaux redondants.

Au cours du début du 21e siècle, Marvin concentre ses recherche sur les fonctions de l’esprit humain. Dans son livre publié en 2006, The Emotion Machine: Commonsense Thinking, Artificial Intelligence, and the Future of the Human Mind, il soutient que les émotions, l’instinct et la raison, sont des formes de pensée et non une forme distincte d’expérience.

Récompenses et Reconnaissances 

En 1961, Marvin Minsky publie un article dont l’impact est incalculable. « Étapes vers l’intelligence artificielle » a ouvert la voie que les chercheurs suivent depuis plus de 50 ans. Bien qu’à ses débuts, l’intelligence artificielle soit le domaine de prédilection d’un petit groupe de la communauté informatique, les idées de Minsky développées dans son livre Computation : Finite and Infinite Machines, ont progressivement gagné en popularité dans la société.

Ses pairs reconnaîtront d’ailleurs ses réalisations en 1969 en lui attribuant le prix Turing, l’ultime distinction dans le monde informatique. Le Dr. Minsky est devenu au fil des années et de ses travaux, une réelle légende dans la communauté de l’IA. Membre émérite de l’Académie nationale des sciences et de l’Académie américaines des arts et des sciences, son influence transcende les frontières académiques. 

Héritage immortel 

Son impact touche aussi bien le domaine de l’informatique, que celui de la philosophie de l’esprit ou des sciences cognitives. Il a aussi bien travaillé sur les processus de pensée des humain en termes mécaniques, qu’au développement des modèles d’intelligence artificielle. Son nom est nommé dans de nombreux livres et films populaires, notamment 2001, l’Odyssée de l’Espace

En janvier 2016, le monde a perdu Marvin Minsky, qui laisse derrière lui sa femme, trois enfants et quatre petits-enfants, mais son héritage continue de prospérer.

Alors que nous naviguons dans un monde numérique, l’héritage de Marvin Minsky résonne dans chaque aspect de l’informatique moderne. Ses contributions à l’IA, sa vision des machines pensantes et sa collaboration avec McCarthy demeurent des piliers fondamentaux, sa vision est une source d’inspiration inépuisable.  


Sources :